samedi, septembre 02, 2006

Plume






Elle traînait là, juste en bas de mon nid gris, entre les bagnoles et les poubelles, déposée sur un carré d’herbe vert-jaune, comme dans un écrin de misère, mais gentiment, mais précieusement, comme un cadeau du fond des âges.

Une plume de pigeon, toute bête, toute conne. Un trésor.

Virevolté de gènes dinosauriens miraculés des chamboulages apocalyptiques, un petit gramme de soies et d’écaillaition mordoré, échappé sans doute au jeune élan d’un être tout heureux de s’essayer au bonheur de l’apesanteur et des immensités, vient m’offrir, au hasard du croisement aléatoire de nos chutes respectives, la preuve tangible et innocente et rayonnante et irrévocable que la vie vibrionne encore, que j’en suis, et comment ! tant elle m’émeut à l’instant par cette rencontre.

Et ce gramme d’écume de vie occulte une seconde la pesante présence des ferrailles et bétonnailles où se lyophilise mon âme et s’enlise désespérément mon cri au monde.

Des êtres s’exaltent , inentravés, enflamment leurs poumons aux airs cristallins des hautes envolées, déchirent les oreilles du monde de leur bonheur de vivre, ignorant combien, au simple spectacle de leur céleste danse, des bipèdes tourniqueurs des lourdes matériosités, ressentent comme une envie, comme un besoin vital d’évaporation, de sublimation.

Et si l’on apprenait le sens du bonheur aux glissades vertigineuses sur le dos du vent de quelques grammes de soies aux reflets mordorés ?

Tout bêtement, tout connement.

Comme un trésor retrouvé ?


(Texte versé au Grand Jeu du Tourniquet...)

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Cadeau de plume et échappée vers la liberté...
A l' instant où je reçois en partage cette promesse d' envolée, un canari échappé de je ne sais quelle prison voisine vient toquer au carreau...
Je sors le saluer et m' émeut de le voir s' adonner aux joies du ciel...
Eclat de soleil que je partage avec toi, Hombre...

Anonyme a dit…

Merci Kaïkan pour le rayon de soleil à plumes.